Quel enjeu, en 2014, pour les municipales de mars et, au-delà, pour les européennes de juin ?
Contre la résignation, l’urgence d’une alternative à gauche
Par Clémentine Autain (FASE), Pierre Gayral (Les Alternatifs) et Ingrid Hayes (Gauche Anticapitaliste),
membres de la coordination du Front de Gauche.
Nous partageons bien des aspects de
la tribune de Pascal Savoldelli, responsable des élections au PCF, parue
dans l’Humanité du 8 juillet. Oui, les élections municipales
constituent un premier test politique pour l’équipe au pouvoir. Elles
sont structurantes dans la vie politique française à l’échelle de
millions de citoyennes et citoyens.
Oui, le danger est réel d’une
extrême droite revigorée par la mobilisation contre le mariage pour
tou-te-s et nourrie par la politique menée par le gouvernement
Hollande-Ayrault. Ce dernier piétine jour après jour les repères qui
fondent traditionnellement l’identité de gauche, du pacte européen
(TSCG) à l’accord sur l’emploi (ANI) en passant par le budget
d’austérité, les cadeaux au patronat, le refus de l’amnistie et
maintenant la « réforme » des retraites, sans parler de sa pusillanimité
face aux affaires, de l’abandon du droit de vote des étrangers.
Le discrédit du pouvoir socialiste
s’affirme et se confirme élection partielle après élection partielle. Au
nom de cet échec, des voix de premier plan au PS s’élèvent pour plaider
l’union de la gauche au premier tour pour garantir l’accès au second,
comme si le rejet populaire de leur politique austéritaire n’était pas
le problème numéro un et comme si, par le passé, les victoires s’étaient
produites à la faveur d’un rassemblement des différentes composantes de
gauche au premier tour. Soyons sérieux.
Alors que le Front national et la
droite ont fait des élections municipales un enjeu national, le Front de
gauche doit viser à changer la donne à gauche, dans l’indépendance
vis-à-vis du gouvernement, à faire prévaloir la rupture avec le
social-libéralisme. Ces politiques menées depuis plus de trente ans ont
accentué l’exclusion, la précarité et les inégalités dans nos villes au
moment même où les collectivités locales se voient imposer des charges
accrues sans moyens financiers. L’acte III de la décentralisation qui se
prépare pourrait aggraver les baisses de dotations avec un impact
désastreux sur les plus fragiles et sur les politiques locales. Nous
devons marquer notre refus de ces choix et ouvrir un espoir à gauche.
Les prochaines échéances électorales
ne seront pas seulement un revers comme la social-démocratie au pouvoir
en a traditionnellement connu : les crises que nous traversons et les
politiques d’austérité modifient les paramètres de la situation. Leurs
effets joueront lors des municipales, que l’on considère l’impact
national qu’elles auront inévitablement ou les coordonnées locales.
Dans ce contexte, il y a une urgence
et une nécessité : nous devons apparaître clairement comme les
défenseurs d’un cap radicalement différent de celui du gouvernement pour
constituer un bloc social et politique large, à vocation majoritaire,
contre l’austérité, en faveur de la transformation sociale et
écologique.
Comment le faire en alliance avec le
PS dès le premier tour ? La politique menée par le gouvernement crée
des contradictions au sein même des partis qui le composent. Il faut
faciliter les alliances avec les équipes militantes, voire les sections
locales du PS ou d’EELV lorsqu’elles s’opposent à l’orientation
nationale ou quand elles acceptent nos bases politiques si nous sommes
chefs de file.
Mais l’on sait bien que ce ne sera
pas le cas général, et notamment pas dans les grandes villes. Les
situations seront variées, c’est l’évidence, mais nous avons besoin
d’une cohérence d’ensemble pour rendre visible l’orientation dont nous
sommes porteurs.
D’ailleurs, comment déconnecter les
élections municipales des élections européennes, où le Front de gauche
aura un profil indépendant, alors qu’elles ne sont séparées que de
quelques semaines, constituant une même séquence électorale ? Nous avons
besoin de listes en phase avec nos convictions, qui nous rassemblent
dans notre diversité tout en étant porteuses d’un profond
renouvellement. Les municipales sont l’occasion de nouer des liens en
profondeur sur tout le territoire avec de nouvelles forces et individus,
de travailler concrètement l’élargissement et le rafraîchissement de
notre cadre d’action.
L’enjeu des élections municipales
est donc de construire, loin des logiques d’accompagnement de l’ordre
existant, des majorités au service des habitants, capables de redonner
confiance au plus grand nombre.
Les municipalités aujourd’hui
dirigées par le Front de gauche représentent un acquis collectif
précieux. Nous sommes résolus à nous battre pour maintenir et élargir
cette influence locale.
Comme Pascal Savoldelli, nous pensons que, pour peser et se déployer, une force politique a besoin d’un maximum d’élus.
Pour y parvenir, dans la durée, il
faut que le Front de gauche soit identifié à une proposition politique
lisible. Au premier tour, il nous faut donc rassembler les forces
opposées à la politique menée par le gouvernement, combattre
l’abstention populaire, faire barrage à la droite et à l’extrême droite.
Mobilisés contre l’austérité, nous serons les candidats d’une
démocratie active, de la défense des services publics, de l’égal accès
au logement et aux transports, de la transition écologique, de l’égalité
entre les territoires.
Nous devons travailler partout où
c’est possible, et en particulier dans les grandes villes, à des listes à
l’initiative du Front de gauche, pour le premier tour des élections
municipales, listes ouvertes aux militants et aux forces qui se
reconnaissent dans cette démarche.
Au second tour, nous nous
mobiliserons pour appeler la population à faire barrage à la droite et à
l’extrême droite. Nous proposerons la fusion des listes de gauche
contre la droite et l’extrême droite en respectant les votes du premier
tour, en refusant toute alliance avec des forces de droite.
Nous ferons tout, c’est l’évidence,
pour empêcher le FN de conquérir de nouvelles municipalités. Mais notre
tâche principale est celle de faire émerger la possibilité d’une
alternative à gauche, contre la résignation et la désespérance. Sinon,
qui en profitera, à part l’extrême droite ?
Par Clémentine Autain (FASE), Pierre
Gayral (Les Alternatifs) et Ingrid Hayes (Gauche Anticapitaliste),
membres de la coordination du Front de Gauche.